En vue durant le Tournoi Maurice Revello 2018, Kévin Denkey a connu depuis une ascension fulgurante. Une première sélection avec l’équipe nationale A du Togo, un premier but avec les Eperviers, un premier contrat pro avec le Nîmes Olympique suivi dans la foulée par un prêt à l’AS Béziers. Le prometteur attaquant de 18 ans revient sur ces évènements marquants. Entretien.
Pour la première participation de son histoire au Tournoi Maurice Revello, le Togo a fait une bonne impression en battant la Corée du Sud (2-1) et en accrochant l’Ecosse (1-1). Que retiens-tu de cette aventure ?
C’était formidable. Je rêvais de jouer avec la sélection du Togo. En amont du tournoi, des rassemblements ont été organisés afin de constituer la sélection et j’ai tout donné pour pouvoir être de la partie. Disputer ce tournoi est un truc énorme pour moi. C’est une compétition renommée, certainement la meilleure qui existe pour la catégorie U20-U21. Je savais que de grands joueurs sont passés par là, c’était une motivation en plus pour prendre part à ce tournoi.
Tu parles des rassemblements. Justement, le Togo par le biais du sélectionneur des Espoirs, Jean-Paul Abalo et du sélectionneur des A, Claude Le Roy, a mis tout en œuvre pour que la sélection réussisse pendant le tournoi en rassemblant une quarantaine de joueurs avant la copétition. Comment ça s’est déroulé ?
On avait plein de rassemblements, on était plus de quarante. Des rassemblements ont été organisés dans tout le Togo dans un premier temps. Il faut savoir que l’équipe U21 n’existait pas avant le tournoi. C’est pour le Tournoi Maurice Revello que ces rassemblements ont été effectués.
Puis, les sélectionneurs sont venus ici en Europe pour réunir des joueurs issus de la diaspora togolaise. C’est à ce moment-là que j’ai été appelé pour un rassemblement à Paris.
Au fil du temps, on a appris à se connaître et à créer des automatismes. Cela a déclenché un petit truc en plus dans le groupe pour le tournoi. Surtout que la plupart des joueurs étaient au courant que c’était un tournoi d’envergure.
A l’issue de ta belle performance (un doublé) contre la Corée du Sud, ton tout premier match avec la sélection togolaise, tu déclarais : « On joue à un niveau international donc c'est important pour moi de me montrer et de prouver ce dont je suis capable ». Justement as-tu eu l’impression de montrer tes qualités durant le Tournoi Maurice Revello ?
C’était une chance pour moi de prouver que je pouvais jouer au niveau international. Il y a des bons joueurs qui évoluent dans des grands clubs. Le niveau international, c’est encore un autre niveau, un autre palier et de pouvoir être bon là, cela veut dire que j’ai franchi un palier justement. C’était très important à mes yeux. Je l’ai pris comme un challenge pour pouvoir montrer que je peux être bon dans ce genre de compétition. C’était important aussi pour l’équipe.
« Marquer pour le Togo, une sensation énorme. Je ne savais plus quoi faire, où j’étais ! »
Après avoir disputé le Tournoi Maurice Revello 2018, tu as fait tes débuts en A contre le Bénin (0-0) en septembre lors des éliminatoires de la Coupe d’Afrique des Nations. Un mois plus tard, tu marques ton premier but avec le Togo contre la Gambie (1-1). Tu as dû vivre de sacrées émotions en peu de temps…
L’année 2018 est partie très fort. Après le tournoi, le sélectionneur Claude Le Roy m’a convoqué avec les A. Contre le Bénin, j’entre en jeu, je remplace Emmanuel Adebayor. Déjà, c’était fou pour moi, d’être là-bas. Être au Togo, c’était un rêve d’enfance, un truc de fou. C’est vraiment un rêve (NDLR : il insiste).
Contre la Gambie, Adebayor n’est pas là, le sélectionneur me donne un peu plus de temps de jeu dans un match important. En perdant cette rencontre, nos chances de qualification s’envoleraient définitivement. Les choses se sont bien passées, on perd 1-0, je rentre, j’égalise. Une sensation énorme. Je ne savais plus quoi faire, où j’étais ! Désormais, il nous reste un match pour aller chercher la qualification (NDLR : déplacement au Bénin, le 22 mars).
Si tu arrives en A, c’est aussi grâce au sélectionneur Claude Le Roy qui a été séduit par tes performances lors du Tournoi Maurice Revello. Quelle est ta relation avec lui ?
Il m’avait vu durant la préparation du Tournoi Maurice Revello. Il me chambre souvent mais il est aussi très dur avec moi, mais il m’affirme que c’est pour mon bien car il croit en moi, en mon potentiel.
Il faut que je fasse plus. Même quand je fais des bons trucs, il ne veut pas me mettre dans une sorte de confort, que je me crois arrivé. Il est tout le temps là pour me piquer, me demander de progresser dans tel ou tel domaine.
On échange énormément, il prend beaucoup de mes nouvelles. Là par exemple, je suis parti en prêt, il m’a conseillé sur la décision finale. On s’appelle, on s’écrit, il est toujours là.
Autre figure importante de la sélection togolaise : Emmanuel Adebayor. Lors d’un rassemblement, tu as dit : « Le capitaine Adebayor me parle beaucoup et c’est grâce à lui que j’arrive à mieux maîtriser et je le remercie beaucoup ». Peut-on dire que l’ancien joueur du Real Madrid t’a pris sous son aile ?
Oui, on peut dire ça. Arriver en sélection et jouer avec lui, je ne m’y attendais pas. Quand j’étais petit, je le voyais à la TV, il nous a qualifiés pour la CAN. J’ai vu ça étant petit, c’était un truc de fou.
On a commencé à échanger, à ma grande surprise, il m’a directement accepté, pris sous son aile. Il me parlait beaucoup, m’a mis à l’aise. C’est le plus ancien de la sélection et il y a fait de grandes choses. Il m’a clairement dit qu’il voyait un potentiel en moi.
On s’appelle beaucoup, on s’envoie des messages, il me conseille toujours. C’est devenu un grand frère. Il me montre le chemin du travail, du sérieux, tous les détails qui font que je puisse devenir un jour comme lui.
Au pays, beaucoup pensent que tu es le successeur d’Adebayor. Qu’as-tu à répondre à ça ?
On n’a pas le même style de jeu même si nous sommes tous les deux des buteurs. Concernant la fameuse succession, il m’a dit qu’il croyait en ça. Pour ma part, c’est ce que je veux clairement mais bien évidemment les choses n’arrivent pas comme ça. Il faut travailler très dur et écouter car je dois encore progresser. Je suis bien entouré en sélection avec Claude Le Roy notamment. C’est quand même une personnalité du football, j’écoute tout ce qu’il me dit. Je me sens bien entouré pour succéder un jour à Emmanuel Adebayor et accomplir de bonnes choses comme lui.
Outre ton ascension sur la scène internationale, tout est allé très vite aussi en club pour toi puisque tu as signé récemment ton premier contrat pro fin décembre avec Nîmes avant d’être prêté dans la foulée à l’AS Béziers. Deux bonnes nouvelles…
Oui, ce sont de bonnes nouvelles. Quand on joue au foot, le rêve c’est de signer un contrat pro et de se dire que tu vis de ta passion. C’est un rêve, vraiment. Dans la foulée, je ne m’attendais pas à ce que cela aille aussi vite. Je n’ai même pas eu le temps de profiter de cette signature. Dès que j’ai signé, j’ai eu des coups de fil du directeur sportif, Laurent Boissier. Il m’a informé de l’intérêt de clubs de Ligue 2 mais aussi de formations belges et suisses.
Parmi eux, l’AS Béziers qui présente l’avantage d’être à côté de Nîmes et qui a le même profil de club, je trouve. Un club qui a envie de réussir et de grandir. Quand j’ai eu le coach de l’ASB au téléphone, il m’a clairement dit qu’il me voulait, qu’il avait besoin d’un profil comme moi. Il m’a convaincu. J’ai demandé conseil aussi à Adebayor ou encore à Steve Mounié (NDLR : l’international béninois d’Huddersfield) qui était à Nîmes auparavant. Les deux m’ont expliqué que leur expérience en Ligue 2 a été bénéfique pour la suite de leur carrière.
Tu as juste 18 ans. Où est-ce que tu dois progresser selon toi ?
Je dois progresser dans la gestion des efforts et le replacement défensif notamment. Au niveau tactique, il faut que je sois plus souvent dans la surface. J’aime bien dézoner, toucher le ballon mais si je veux marquer, je dois être plus présent dans la surface et être plus tueur aussi.
Sur le plan tactique aussi, dans les déplacements notamment. J’ai des qualités mais il faut travailler encore plus et écouter. Avec l’aide des coaches au Togo, monsieur Blaquart à Nîmes et ici à Béziers. Le coach Chabert a déjà remarqué certaines choses.
Propos recueillis par Amayes Brahmi -
Crédits photo : Eric Estrade