Vous entendez souvent sa voix sur les ondes de BeIN Sports, notamment lors des matchs de Ligue 1. Depuis plusieurs années, Brahim Thiam exerce le métier de consultant sportif après avoir connu une carrière fournie qui lui a permis de fouler les pelouses de l’élite française, espagnole mais aussi africaine avec l’équipe nationale du Mali.
L’ex-défenseur a accepté de nous évoquer sa nouvelle vie mais aussi le Tournoi Maurice Revello 1993 disputé avec l’équipe de France. « Un grand souvenir », dixit l’intéressé. Entretien.
Lors d’un entretien accordé au site spécialisé Ultimo Diez, tu disais : « Le Tournoi de Toulon a été pour moi une première expérience avec le football de haut niveau en jeune avec une vraie adversité ». Est-ce que tu peux nous en dire plus ?
J’arrivais au bout de mon processus de formation. J’avais connu quelques sélections en juniors aussi mais je m’étais blessé et je n’avais pu les honorer jusqu’au bout. La fin du cycle de cette formation, c’était l’équipe de France et le Tournoi Maurice Revello. On était dans le football international, de plus haut niveau, l’antichambre de ce que j’allais connaître derrière.
Cela m’a permis de côtoyer des joueurs qui jouaient dans différents clubs et certains évoluaient déjà en Division 1. C’était aussi l’occasion d’affronter de très bons joueurs issus de différentes nations venues de tous les horizons. Le Tournoi Maurice Revello est un grand souvenir de ma vie.
A ce moment-là, tu es en équipes de jeunes à Montpellier. Peut-on dire que le tournoi t’a aidé à prendre confiance en toi voire à taper dans l’œil de certains observateurs ?
J’ai eu la chance de posséder cette qualité naturelle d’avoir confiance en moi, cela m’a permis de ne pas douter même dans les moments difficiles. Le tournoi m’a surtout permis de prendre conscience que le haut niveau demande beaucoup de choses.
Aller en finale, cela montre la qualité de notre parcours et cela te donne de la crédibilité au niveau national et international. A cette époque, j’avais tapé dans l’œil de Jean Tigana qui était l’entraîneur de Lyon. Il voulait me ramener là-bas, cette information est arrivée jusqu'aux dirigeants montpelliérains qui ne l’entendaient pas forcément de cette oreille. C’est une anecdote sur la qualité de ce que j’avais fait à l’époque.
Pourquoi ce transfert à Lyon ne s’est pas concrétisé ?
J’étais sous contrat avec Montpellier et je pense que dans les mœurs du centre de formation, on ne se piquait pas les joueurs comme ça.
On peut dire que tu étais l’un des tauliers de cette équipe de France lors du Tournoi Maurice Revello 1993 avec quatre titularisations. Est-ce qu’il y a un match qui t’a marqué ?
Le meilleur match qu’on ait fait, c’était contre le Portugal où on gagne 3-0 (NDLR : doublé de Florian Maurice et but de Steve Marlet). On est montés crescendo au fil de la compétition avec notamment des rencontres face à l’Ecosse et le Bulgarie puis il y a eu ce match abouti contre les Portugais.
La finale à Toulon, c’était différent. C’était un peu crispé, je me souviens de la présence côté anglais de gros joueurs comme Jamie Redknapp. C’était déjà une première marche très haute pour nous face à un pays fort. On n’a fait ni un gros ni un mauvais match, cela s’est joué sur des détails.
Des détails que tu as pu comprendre, visualiser à travers le tournoi au vu de sa dimension internationale…
Oui, bien sûr. Chaque match qu’on a fait là-bas relevait de plusieurs facteurs. C’est toujours ça dans une compétition, chaque match a une histoire différente. Ce sont les détails qui font la différence dans le bon ou le mauvais sens. Au fur et à mesure du tournoi, il faut analyser et comprendre ce qui va bien ou pas. Gommer les détails négatifs et les transformer en détails positifs.
"Le Tournoi Maurice Revello a vu passer la moitié des plus grands joueurs de la planète"
Tu as connu le tournoi en tant que joueur, tu dois le suivre également en tant que consultant. Quel regard portes-tu sur le tournoi ?
Je suis un fan fervent de ce tournoi ! J’ai commenté récemment France-Corée du Sud à Aubagne dans le cadre du Tournoi Maurice Revello 2018 (NDLR : BeIN Sports diffuse le Tournoi Maurice Revello en France depuis 2014). J’ai toujours été fan de ce tournoi car il a vu passer la moitié des plus grands joueurs de la planète. C’est une vraie antichambre du haut niveau.
Hormis les Euros et les Coupes du Monde, nous avons chez nous en France, une compétition qui implique beaucoup de grandes sélections. Si autant de monde se déplace, y compris dans les tribunes, c’est aussi dû à la qualité des joueurs.
Quand j’ai commenté ce fameux France-Corée du Sud, il y avait le petit Kangin Lee de Valencia qui est aujourd’hui en équipe première. Quand on suit un peu le football et quand on voit ces choses-là… il n’y a pas de hasard dans la vie !
Aujourd’hui, tu es devenu consultant après une carrière de footballeur plutôt riche. Comment tu t’es tourné vers cette voie ?
Quand j’étais joueur, j’ai eu la chance d’avoir un oncle, Serge, qui était assistant réalisateur de Jean-Paul Jaud à Canal+. Il était déjà dans le monde de la télévision, je le suivais souvent quand j’étais joueur. Parallèlement, j’étais très ami à l’époque, et je le suis toujours, avec le réalisateur Fred Godard. De temps en temps, quand j’avais des temps faibles, j’allais dans le car, je regardais un petit peu, j’ai toujours été intéressé par ce métier.
Puis, à la fin de ma carrière, je me suis lancé. Dans la vie, si tu attends que les opportunités tombent tu vas attendre longtemps, si tu vas au-devant des opportunités, c’est différent. C’est ce que j’ai fait. J’avais contacté, juste avant la création de BeIN Sports en 2012, Charles Biétry en charge de la création de la chaîne à cette époque.
Charles m’avait redirigé vers le responsable du football, qui y est toujours aujourd’hui, Stéphane Mislin. Ce dernier m’a reçu à Paris. On a discuté et au préalable j’imagine qu’il a fait une enquête de personnalité auprès de certaines personnes qui me connaissaient : tous les ingrédients ont été réunis pour que je commence du jour au lendemain.
Je pense qu’il y avait une possibilité de qualité de travail associée à l’image qui a plu aux responsables de la chaine qui m’ont engagé. Huit ans plus tard, on est toujours dans le même processus, conforté par celui qui a pris la succession de Charles Biétry, Florent Houzot, le directeur de la rédaction. Des personnes importantes pour moi car elles ont cru en moi. Je suis satisfait du travail que je fais, je pense qu’ils le sont également sinon je ne serais pas encore là huit ans après à BeIN. J’y ai mis beaucoup de travail, de conviction et de professionnalisme comme ce que je fais habituellement et c’est ce qui me permet de m’éclater dans ce métier-là !
A l’instar d’un joueur, un consultant évolue dans son parcours. Huit ans après, quel bilan fais-tu de ta carrière de consultant ?
Je retiens premièrement que j’ai une grande capacité de travail sur le fond et la forme. Ce que je n’ai pas fait à l’école, je le fais maintenant. A l’école, j’avais des capacités mais j’étais un fainéant. J’ai appris, notamment sur les grandes compétitions journalières comme la Coupe du Monde ou la Copa America, que j’étais capable d’emmagasiner une grande quantité de travail du jour au lendemain. Notamment de retenir par cœur plein de choses. Prenons l’exemple du Mondial 2014 : j’ai commenté des matchs tous les jours, de la Corée du Sud, du Nigeria, de la Belgique ou encore de la Croatie. Tout ça se travaille ! Il faut connaitre les joueurs, avoir des petites anecdotes à livrer. Tous les jours, de 6h à 11h du matin, je préparais mon match. Il faut avoir la capacité de retenir, de comprendre et de retranscrire surtout. Le travail du commentateur, c’est la retranscription surtout. Les gens s’en foutent que tu aies passé une heure ou six sur ta rencontre. Ils vont attendre que tu leur donnes des bonnes infos, que tu parles bien, que tu leur fasses comprendre le foot s’ils ne le comprennent pas sans être rébarbatif et ennuyant. Un bon consultant, c’est celui qui explique simplement. Vu les retours que j’ai, ça a l’air de plutôt bien se passer !
Dernière question sur le Mali : nous avons interviewé l’été dernier Diadie Samassekou, passé comme toi par le Tournoi Maurice Revello (NDLR : en 2016). Le joueur d’Hoffenheim nous disait : « Au vu de ce qu’on a montré durant la dernière Coupe d’Afrique et vu l’âge moyen de l’effectif, je pense que dans les années à venir le Mali va faire partie des prétendants au titre ». Partages-tu son analyse ?
Je l’espère car depuis ma génération en 2004 (NDLR : le Mali avait atteint les demi-finales de la Coupe d’Afrique), avec les Momo Sissoko, Mahamadou Diarra, Seydou Keita, il n’y avait pas eu un truc comme il y a actuellement dans cette équipe. Même si, il y a un petit bémol : on manque d’efficacité offensive, c’est ce qui nous fait défaut. Ça sera peut-être réparé dans le futur avec un jeune et talentueux joueur en la personne d’El-Bilal Touré qui est au Stade de Reims aujourd’hui. On a une génération de joueurs qu’il faudra amener au plus haut niveau, c’est le travail du staff technique. Cela passera par des résultats pour que ça ne reste pas juste une génération dorée.
Propos recueillis par Amayes Brahmi -
Crédits photo : Compte Instagram Brahim Thiam