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6 juillet 2021

Emerson à la porte

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Après deux saisons et demi au Betis, Emerson débarque enfin dans le club qui l’a recruté en janvier 2019 puis transféré dans la foulée, le FC Barcelone. Fort de belles performances en Andalousie, le latéral brésilien devra tout de même faire face à une concurrence rude… à moins que son avenir se s’inscrive encore ailleurs.

« Tout vient à point à qui sait attendre », dit le proverbe. Après deux ans à patienter, Emerson est enfin là où il le souhaitait. Débarqué en Espagne en janvier 2019, le latéral brésilien avait signé au FC Barcelone mais n’en a jamais porté les couleurs. Le club catalan a préféré l’envoyer s’aguerrir aux joutes de la Liga plus au sud, au Betis. Ce qui devait être une sorte de sas temporaire s’est avéré durer dans le temps, au point que l’on n’imaginait pas le joueur regagner la Catalogne. Mais quasiment trente mois plus tard, le défenseur est bien de retour là où il n’a finalement jamais été. Début juin, le club blaugrana a exercé son droit de récupérer le joueur, qu’il co-détenait avec le Betis. Emerson est officiellement barcelonais, et tant pis pour les montages alambiqués et les deals opaques dont il a fait l’objet.

« Quand le Barça le recrute, c’est dans un moment délicat car le club a des antécédents pas très glorieux avec les joueurs brésiliens, relate Tracy Rodrigo, journaliste consacrée au football espagnol Furia Liga. Il y en a beaucoup qui arrivaient pour des raisons autres que sportives, avec des histoires d’agent notamment. Quand le nom d’Emerson sort dans la presse, on pense que c’est un énième brésilien qui va servir de monnaie d’échange dans un deal ». Ce ne fut finalement pas le cas pour le vainqueur du Tournoi Maurice Revello 2019 avec la Seleção, qui sortait alors d’un passage court mais réussi à l’Atlético Mineiro, dans son pays natal. Journaliste pour Lucarne Opposée et spécialiste du football brésilien, Marcelin Chamoin se souvient de ses années au sein du club de Belo Horizonte. « Il y a joué peu de temps mais il s'y est rapidement imposé comme un titulaire et il s'est mis en valeur lors du championnat sud-américain U20 et du Tournoi Maurice Revello en 2019, ce qui a permis son transfert en Espagne. Il n'a pas eu le temps de se faire un nom dans tout le Brésil mais il a laissé un bon souvenir aux supporters de l'Atlético Mineiro, même s'ils étaient satisfaits du transfert puisque la somme était assez élevée et qu’ils avaient déjà un remplaçant avec Guga ».


Emerson face à l'Indonésie lors du Tournoi Maurice Revello 2019

Fort notamment de deux participations au Tournoi Maurice Revello en 2017 et 2019, Emerson affiche déjà des qualités au-dessus de la moyenne et éveille les intérêts un peu partout en Europe, mais aussi ceux du sélectionneur national Tite, qui voit en lui un potentiel futur cadre de son équipe. « Grâce à son transfert au Barça et sa convocation pour la Copa América, il commence à se faire un nom, décrypte Marcelin Chamoin. En Seleção, le successeur de Dani Alves n'est jamais vraiment arrivé et Danilo va bientôt avoir 30 ans. Emerson est donc vu comme un possible titulaire à un poste déficient au Brésil depuis plusieurs années. Son principal concurrent est Guga, qui a le même âge. Ils sont pour moi les deux titulaires potentiels dans les années à venir en Seleção ».


Le Brésil, vainqueur du Tournoi Maurice Revello 2019 avec Emerson... et Guga

L’ombre de Firpo… ou d’un départ

Comme le potentiel et les prédictions ne suffisent pas, Emerson a dû prouver. Et il l’a fait. Souriant et chambreur, il a ajouté à sa bonne humeur naturelle des prestations de grande qualité sous le maillot du Betis. Au point de le comparer avec un ancien latéral du club andalou parti pour… le Barça, Junior Firpo. « Firpo ne s’est jamais imposé à Barcelone alors qu’il était intéressant au Betis, se souvient Tracy Rodrigo. Le profil n’est pas tout à fait le même non plus. Emerson défend mieux, il a moins d’absences, c’est le latéral moderne, très offensif, et il fait ça très bien. C’est un très bon centreur aussi. Il a beaucoup apporté au Betis de Manuel Pellegrini qui avait tendance à s’enfermer dans un jeu de possession stérile, sans véritable joueurs qui apportaient le surnombre, et Emerson, lui, apportait ce déséquilibre ».

« Quand tu joues au Betis, ce n’est pas compliqué de sortir du lot, ajoute de son côté François Miguel Boudet, également journaliste pour Furia Liga. Tu vois un joueur déborder, centrer… et tu as tout de suite un miroir grossissant sur ses performances, c’était le cas avec Firpo notamment. Après, quand tu arrives dans un gros club, tu es plus observé et ce n’est plus pareil ». Prédire la carrière d’Emerson à Barcelone relève de la science-fiction, quand bien même ses qualités pousseraient à l’optimisme. Pour autant, il lui faudra d’abord se faire une place au sein du collectif catalan et notamment à un poste de latéral droit où l’embouteillage, pour ne pas dire l’empilement, guette : avec trois à quatre joueurs pouvant évoluer dans le couloir droit, la concurrence sera féroce. « Emerson titulaire ? Tout dépendra de Sergi Roberto, de s’il part ou du niveau qu’il affichera s’il reste, prévient Tracy Rodrigo. Ronald Koeman ne semble pas avoir une confiance folle en Sergiño Dest. Il arrive à un poste où il n’y a pas de titulaire indiscutable, donc il aura totalement sa chance. Et c’est un poste un peu sinistré au Barça depuis le départ de Daniel Alves ».


Emerson avec le trophée du Tournoi Maurice Revello 2019

Reste désormais une dernière inconnue et pas des moindres : la situation économique du FC Barcelone. De retour à la présidence du club depuis mars dernier, Joan Laporta n’a jamais caché les difficultés financières auxquelles est confronté le Barça, qui a grand besoin de liquidités. Et pour en trouver rapidement, il n’y a qu’un seul véritable moyen : la vente de joueurs. Emerson pourrait en faire les frais. Selon la presse espagnole, le club pourrait s’en séparer en cas de belle offre. Actuellement au Brésil pour disputer la Copa América avec sa sélection, le défenseur n’a pas été autorisé à se rendre aux Jeux Olympiques de Tokyo fin juillet. Il partira ainsi en vacances après la finale de la compétition sud-américaine (le Brésil s’est qualifié pour la finale, NDLR) avant d’enfin mettre le cap sur la Catalogne. Ou ailleurs…

Mathieu Lauricella