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25 March 2019

INTERVIEW - Stéphane Sparagna : « Le Tournoi Maurice Revello, c’était deux semaines de folie »

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Vainqueur de la compétition, buteur en finale, capitaine de son équipe, nommé dans le onze type du Festival… Difficile pour Stéphane Sparagna d’oublier le Tournoi Maurice Revello 2015 tant il fut riche en émotions. Quatre ans plus tard, le défenseur central se souvient de tout. Il revient sur cette expérience et sa carrière, qui l’a emmené à Porto après l’OM et Auxerre. De ses débuts en pro à son but en finale contre le Maroc, en passant par Marcelo Bielsa et les galères d’une blessure au genou, le Marseillais se confie. Entretien.

Stéphane, tu as participé au Tournoi Maurice Revello en 2015. Quels souvenirs gardes-tu de cette aventure ?

Un très bon souvenir sachant qu’on l’a gagné, j’ai marqué en finale, j’étais capitaine… Finir la saison en apothéose avec le Tournoi, je ne peux qu’en garder de très bons souvenirs.

Jouer avec le maillot bleu et en plus en tant que capitaine dans ta région, ce devait forcément être spécial…

Oui, tout était réuni pour que ce soit parfait. On avait vraiment une bonne équipe, on était des « collègues », il y avait une très bonne ambiance. En plus, on n’a pas perdu un match… C’était vraiment deux semaines de folie.

Vous aviez remporté la compétition en faisant un sans-faute avec cinq victoires en autant de rencontres, on avait senti énormément de maitrise et de sérieux…

Oui, après quand on regarde les garçons qui composaient l’équipe, il y avait beaucoup de bons joueurs : Presnel Kimpembe et Thomas Lemar qui sont devenus champions du monde l’année dernière. Il y avait aussi des joueurs comme Farès Bahlouli, Enzo Crivelli devant… Franchement, c’était vraiment une équipe complète. Tout était réuni pour aller au bout et gagner le tournoi, il y avait de la qualité sur le terrain et en dehors aussi en tant que personnes, sur le plan humain. J’en garde vraiment un super souvenir. Même quatre ans après, je me rappelle exactement de tout tellement c’était énorme. Les tournois de fin de saison sont souvent difficiles, les joueurs ont un peu la tête ailleurs après une grosse saison et c’est une échéance de plus pendant les vacances. Et au contraire, on s’est tout de suite mis dans le bain en arrivant. On avait déjà créé des liens pendant les rassemblements qu’on avait pu avoir pendant la saison. C’était vraiment un bon groupe, avec une belle cohésion sur et en dehors du terrain, et ça s’est ressenti pendant les matchs.

Et tu t’es aussi découvert des talents de buteur en marquant à deux reprises lors du premier match contre les Etats-Unis (3-1) et en finale contre le Maroc (3-1)…

Oui ! Je crois que j’avais marqué un seul but dans la saison en CFA, et là, en l’espace de deux semaines, j’en mets deux. C’était énorme, surtout le but en finale car il y avait énormément de supporters du Maroc. J’avais limite l’impression qu’il n’y avait pas de supporters français, c’était assez spécial (rires). Mais c’était bon enfant, et puis c’est bien quand il y a un peu de pression comme ça, c’est toujours mieux pour les joueurs plutôt que d’arriver dans un contexte facile, où il n’y a pas d’ambiance.


Les supporters marocains venus en nombre pour la finale au stade Mayol en 2015

« La charnière centrale OM-PSG, on en rigolait avec Presnel »


Dans cette équipe tu as joué aux côtés de Thomas Lemar et Presnel Kimpembe, tous deux champions du monde aujourd’hui. Avais-tu senti leur potentiel à l’époque ?

Oui. Surtout Thomas qui était déjà en Ligue 1 et enchainait les matchs avec Caen en tant que titulaire. Niveau qualité, il était énorme. Presnel, c’était un peu comme moi, on arrivait dans le groupe pro au sein de nos clubs, on avait fait quelques entrées, on ne jouait pas tous les matchs. Ce n’était pas comme Thomas, qui était plus en avance. Mais ça se sentait que tous les deux avaient les qualités pour grandir et évoluer au haut niveau.

Tu formais d’ailleurs une solide et étonnante charnière centrale OM-PSG avec Kimpembe…

(Rires) Oui, c’était drôle. Au début, on en a un peu rigolé. Mais c’était efficace donc c’était le plus important. Après, tout ce qui est OM-PSG, quand tu es en équipe de France, tu fais abstraction.

Vous étiez coachés par Francis Smerecki, qui nous a malheureusement quittés en juin dernier. Que retiens-tu de lui sportivement et humainement ?

Franchement, que du bon. Je me rappelle du premier rassemblement que j’ai fait, il m’avait dit que comme j’étais un joueur qui avait commencé avec les pros, c’était intéressant de voir ce que ça pouvait donner en équipe de France. En gros, il me donnait ma chance et c’était à moi de faire mes preuves. Et on connaît la suite, j’étais capitaine au deuxième rassemblement puis au Tournoi Maurice Revello. C’était vraiment un super coach, proche de ses joueurs, toujours là pour aider personnellement ou collectivement avec son staff, qui était top aussi. Dans ce groupe, que ce soit les joueurs, le staff, l’entraîneur, on ne formait qu’un. C’était spécial. J’ai vraiment apprécié le coach, je n’ai que des bons souvenirs avec lui. On l’avait porté en triomphe après la finale contre le Maroc parce que c’était son dernier match. Ça nous tenait à cœur aussi de remporter la compétition pour lui.


Francis Smerecki porté en triomphe par ses joueurs après la victoire face au Maroc en 2015

« En une saison avec Bielsa, j’en ai gagné quatre »


Tu sortais à l’époque d’une saison très spéciale avec l’OM sous la houlette de Marcelo Bielsa qui t’avait lancé dans le grand bain. Que retiens-tu de cette saison ? Que t’avais apporté le coach ?

C’est une saison qui est allé à deux mille. Au début, je faisais partie du groupe élite, composé de plusieurs jeunes qui allaient intégrer le groupe pro. J’étais loin d’imaginer tout ce qui allait suivre. Je suis arrivé comme un jeune insouciant, je m’entraînais avec les pros, sans me poser de questions. Et puis, j’ai débuté pour la première journée à Bastia, j’ai fait des bancs, quelques entrées en jeu. Parfois, je redescendais en CFA, ce qui était normal. Au début, c’était difficile car les méthodes Bielsa demandent un temps d’adaptation pour assimiler tout ce qu’il veut. Mais en l’espace d’une saison, j’en ai gagné quatre en termes d’expérience, de qualité, tactiquement, techniquement, en maturité… En tout, en fait. On apprend vite avec cet entraîneur. Ce qui est bien avec lui, c’est qu’il ne pense pas à ce que vont dire les médias. S’il estime qu’il faut faire jouer un jeune, il se fout de savoir s’il a 16 ans, 20 ans, 22 ans ou s’il n’a encore rien prouvé au haut niveau. Du moment où le jeune s’entraîne bien la semaine et qu’il pense que celui-ci peut apporter quelque chose et que c’est le bon moment pour le lancer, il n’hésitera pas. Et c’est ça qui était bien. La plupart des coachs sont sur la retenue, ce qui est compréhensible car il y a des attentes niveau résultats. Mais Bielsa ne faisait pas de différence entre le jeune et l’expérimenté. Il faisait jouer qui il pensait bon de faire jouer.

Tu as dû ensuite quitter l’OM, d’abord en prêt à Auxerre puis définitivement pour le Boavista Porto. En tant que marseillais de naissance, formé au club, ça n’a pas dû être facile…

C’est moi qui l’ai voulu, donc ça a été moins difficile que si j’avais été forcé de quitter le cocon. C’est sûr que quand tu pars de l’OM et que tu te retrouves dans un club moindre, les conditions ne sont pas les mêmes. Ce n’est pas qu’elles sont mauvaises, mais l’OM, ça reste l’OM. On y est chouchouté, on est dans un grand club. Alors que quand tu pars à Auxerre ou à l’étranger, tu es un peu plus livré à toi-même. Après, quand tu quittes le cocon familial, soit tu te débrouilles et tu sors la tête de l’eau, soit tu coules. Mais ce challenge m’a aussi plu dans le sens où j’avais besoin de me retrouver seul, de ne plus avoir papa, maman et les amis à côté… Je ne voulais pas rentrer dans une routine de facilité. Je devais sortir et grandir en tant qu’homme et même footballistiquement, quitter ce cocon.

As-tu des regrets sur ton parcours à l’OM ?

Non. Peut-être que si je n’étais pas parti et que si je n’avais pas eu les expériences que j’ai pu avoir à Auxerre et Porto, je n’aurais peut-être pas grandi comme je l’ai fait jusqu’à maintenant. Après, on peut toujours se dire que je suis parti avant que Rudi Garcia n’arrive, donc peut-être que j’aurais dû attendre. Mais ce sont des questions que je ne me pose pas. Je fais mon chemin. Tout ce que j’ai fait m’a servi. A l’OM, j’ai fait ce que j’avais à faire. Le football est fait de choix, et si on commence à les regretter, on ne s’en sort plus. Tout ce que j’ai connu à Auxerre et Porto m’a fait grandir, donc ce n’est peut-être pas plus mal.

Au Boavista, tu as réussi une saison pleine l’an dernier en jouant 23 matchs. Comment t’es-tu adapté à ta nouvelle équipe et ce nouveau championnat ?

Je suis quelqu’un de sociable, de sympathique donc ça m’a permis de créer vite des liens avec tout le monde et j’ai rapidement été intégré au groupe. Quand on vient de Marseille, c’est toujours plus simple car ça reste un grand club. Ça parlait encore de Bielsa à l’OM donc il y avait des sujets de discussion, c’est tout de suite plus facile de s’intégrer. Je suis arrivé ici sans connaître personne, je ne parlais pas la langue donc le seul moyen de m’exprimer, c’était sur le terrain. Je ne me suis pas posé de questions, je me suis entraîné comme je savais le faire. Le coach ne m’a pas fait jouer les quatre premiers matchs, et pour le cinquième, il a décidé de changer sa charnière et de m’intégrer. Et de là, c’était parti, j’ai enchaîné, j’ai connu des hauts, des bas. C’est toujours difficile d’enchaîner les matchs surtout à l’étranger. Mais ça s’est bien passé et j’ai fait une saison presque pleine, pour moi.


L'équipe de France vainqueure du Tournoi Maurice Revello en 2015

Cette saison, ton temps de jeu s’est réduit et tu n’as pris part qu’à trois rencontres à cause d’une blessure que tu traînes depuis plusieurs mois. Comment vas-tu et comment le vis-tu ?

Je me suis fait opérer d’un problème au genou en mai dernier. J’ai repris trop fort et trop vite, et avec les inflammations, c’est ce qui m’a un peu freiné. Ce n’est pas un choix de l’entraîneur, j’ai brûlé les étapes, du coup automatiquement, il faut s’arrêter un peu plus et repartir sur de bonnes bases. Jusqu’à décembre, je jouais, puis je m’arrêtais, je reprenais et puis je stoppais de nouveau, jusqu’au moment où je me suis dit que ça ne servait à rien de faire ça. J’ai donc suivi des soins et des traitements et actuellement, je suis en phase de réhabilitation. On essaie de faire en sorte que le genou ne réagisse pas trop, on y va étape par étape, sans aller vite, pour éviter de repartir dans les galères d’auparavant.

En juillet 2017, tu déclarais dans une interview pour Foot Mercato « Le Portugal a un championnat relevé et je pense que c’est une bonne expérience à vivre pour moi. Boavista est l’un des clubs qui fait le plus de ventes. Pas mal de clubs plus huppés viennent piocher dans ces équipes. Si je me donne les moyens d’y arriver, ça peut être pas mal pour la suite. Je sais que ce championnat est vachement regardé ». Un an et demi plus tard, quel bilan tires-tu de ton expérience portugaise et comment vois-tu ton avenir ?

Il me reste une année de contrat. J’ai quitté la France pour découvrir un autre pays, une autre culture, un autre championnat. Tout change donc il faut s’adapter. Être loin de ses amis et sa famille, ça forge, tu es obligé de te débrouiller, d’apprendre la langue, c’est ce qui m’a plu. Ça me sert, ça me permet de grandir, de me découvrir moi-même, mes limites, que ce soit au foot ou en dehors. C’est une bonne expérience. J’ai eu la chance de faire une saison quasiment complète, mais c’est vrai que si je n’avais pas joué, ça aurait été plus compliqué.

Avant, je pensais beaucoup à mon avenir, mais maintenant non. Au plus je grandis, au plus je suis patient. Je pense jour après jour. Je veux d’abord bien reprendre, en finir avec mes problèmes de genou et terminer la saison en essayant de jouer quelques matchs, et puis faire une bonne préparation et reprendre avec Boavista la saison prochaine. Le foot, c’est compliqué à prévoir. Je veux surtout bien récupérer, rejouer et cet été faire tout ce qu’il faut pour être prêt.

Propos recueillis par Mathieu Lauricella

Crédits photo : Magali Ruffato

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